Souvenez-vous, chers happy few : Epinal, il fait froid, le sac à dos est plein, les auteurs sont sympas, le train nous attend, il me reste 6 euros tout ronds. Je ne veux pas partir avec (ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien, encore un mystère aussi insondable que le succès de Christophe Maé), je les sors donc du girly porte-monnaie bleu et je les échange contre
Le miroir aux éperluettes de Sylvie Lainé.
Il s'agit d'un recueil de 6 nouvelles, qui n'avaient jamais été réunies (en fait, il s'agit du premier recueil de nouvelles de Sylvie Lainé, qui en a pourtant écrit une vingtaine, dont certaines ont été primées). C'est chose faite grâce à ActuSF et à sa petite maison d'édition, Les 3 souhaits (joli nom), qui propose là un bel ouvrage (même si la couverture ne m'emballe pas, je la trouve... trop verte), que j'ai acheté disons-le tout net à cause de son titre. Comme vous le savez, j'ai une passion dévorante pour les mots désuets, les mots bizarres, les archaïsmes et les mots administratifs et cet "éperluette", qui m'a rappelé "esperluette" ne pouvait que m'attirer (renseignement pris, "éperluette" désigne le signe &). Et qu'avons-nous donc dans ce recueil (tiré à 350 exemplaires, ce qui est malheureux quand on voit la qualité d'écriture de Sylvie Lainé), chers happy few ? Nous avons 6 nouvelles de SF qui ont pour thème commun le regard. Si La mirotte, qui raconte une histoire d'expérience oculaire à partir de l'implantation d'une machine dans le cerveau de volontaires ne m'a pas vraiment convaincue (thème trop rebattu et fin en queue de poisson), j'ai vraiment beaucoup aimé les autres, de Question de mode, qui interroge les complexes adolescents dans un cadre très SF, à Un rêve d'herbe, qui, si elle présente une histoire pas très originale d'amour et d'arbres, est extrêmement bien écrite, ce qui la rend très poétique, en passant par Thérapie douce, une nouvelle assez glaçante sur une expérience sur la manipulation des comportements humains. Mais les deux nouvelles que j'ai préférées sont les deux histoires d'amour qui ouvrent et ferment le recueil : La bulle d'Euze, dont le traitement est très original (je n'en dis pas plus, il ne faut pas spoiler, mais vous ne regarderez plus jamais da la même manière les jolies femmes solitaires dans les cafés) et Un signe de Setty, qui a reçu le prix Rosny aîné 2003 et qui est une variation sur la virtualité et l'humanité. Bluffant.
CULTURES NUMERIQUES - Page 19
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Le complexe de Wendy
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sous les bombes
Voilà un roman, chers happy few, que je n'aurais jamais eu l'idée d'ouvrir si on ne me l'avait pas mis dans les mains (il fait partie de la sélection du prix Landerneau) : le sujet ne me tente pas et je lis très peu de romans édités dans la Blanche, bref, autant de préjugés qui font que je serais passée à côté et ça aurait été vraiment dommage, tant ce roman, dense et foisonnant est une excellente découverte! L'histoire de cette jeune fille, écartelée entre la France et le Liban (sa mère, enfuie avec un amant, était Française), entre la guerre qui fait rage à l'extérieur et la quiétude illusoire et trompeuse de son foyer (sa famille vit comme s'il n'y avait pas de combats, pas d'obus, pas de tireurs embusqués), entre la modernité procurée par son père (elle est libre, elle va au Lycée, même sous les bombes, elle traîne dans les rues dangereuses) et le traditionalisme de ses oncle et tantes (ils veulent qu'elle porte le voile, qu'elle accepte un mariage arrangé, qu'elle ne bouge plus de la maison) est d'une incroyable violence à la fois montrée et retenue, qui sourd des paragraphes où alternent la première et la troisième personne, comme si parfois cette narratrice se regardait vivre de loin, tant la réalité est douloureuse. Cette histoire initiatique est magnifiquement servie par une langue acérée et froide comme l'acier des armes et par un style vraiment très beau, extrêmement puissant. On suit cette histoire en sentant monter progressivement un sentiment d'inéluctable jusqu'à la fin, espèce d'apothéose abrupte et brutale qui m'a laissée sans voix.
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contes cruels , nouvelles
recueil de nouvelles d'Emmanuelle Urien et dans les commentaires, l'éditeur, Yann Leclerc, a proposé de l'envoyer à celui qui en ferait la demande le premier. C'était un dimanche, il était trop tôt pour ceux qui sont sans enfants, j'ai été la première à me manifester et le vendredi il était dans ma boîte...
Court, noir, sans sucre, comporte 13 nouvelles dont la majorité tournent autour de la mort et de la difficulté du deuil. J'ai trouvé que Assistance technique, La place du mort et surtout Le chemin à l'envers étaient les plus émouvantes car elles traitent de la perte d'un enfant. Dans le panneau apporte un angle original dû au choix du narrateur et La vie au gramme près (dont vous devinerez tout seul la thématique grâce au titre) est assez terrible. Dans un autre registre, Femme d'intérieur, une des plus courtes nouvelles du recueil, peint en trois pages, avec une impressionnante justesse, un portrait de femme battue, Tête de station un rêve de SDF, La mer à boire un père monstrueux... Les histoires sont grinçantes, parfois drôles, comme Tristesse limitée dont la chute m'a carrément fait rire.Le style est varié et percutant, parfois poétique (comme dans Guerre lasse, qui est une de mes préférées), les situations varient, souvent cruelles mais toujours "justes". J'aime beaucoup l'univers de l'auteur, dans lequel je me reconnais pas mal (à tel point qu'aucune chute ne m'a prise de court). A ce titre, je décernerais une mention spéciale à Jardin secret, nouvelle étrangement dickienne (ce qui est bien évidemment un gage de grande qualité)!
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chat
J'ai décidé bien sûr de ne vous révéler que des choses hautement kulturelles!
1. Je porte un prénom générationnel, qui n'a plus été donné à aucune fille depuis 1997. Il est donc vintage, dans quelques années il sera classe.
2. J'ai dansé sur scène avec Patrick Dupond. Il y avait un "porté" dans le ballet, c'était Patrick himself qui me tenait à bout de bras. Ce fut l'apothéose de ma carrière de danseuse. J'avais 6 ans.
3. Comme Rachel Greene, dans Friends, je suis une fille easy-going : je suis toujours le mouvement. Un ciné ? Un restau ? Une sortie shopping ? Un musée ? Un changement de dernière minute ? Tout me va, et c'est de bon coeur. A tel point que de méchantes langues prétendent que je suis carrément pushover : on me fait très facilement changer d'avis...
4. Comme Elizabeth Bennett, je n'ai que des soeurs. Et j'en suis ravie.
5. Comme Stephanie Plum, je fais mourir toutes les plantes qu'on m'offre, même celles en plastique et je suis prête à faire des kilomètres pour aller manger chez ma mère, la meilleure cuisinière du monde et de ses environs. Je suis d'ailleurs d'une très grande curiosité culinaire : partout où je vais, à peine mes valises posées, je commence par goûter les spécialités gastronomiques. Tout me tente, rien ne me dégoûte, mais je n'aime pas cuisiner (contradiction quand tu nous tiens!).
6. Comme Miss Marple, je tricote. Et comme Meredith Grey, je ne finis jamais mes tricots. Heureusement, ma belle-mère les finit pour moi et en temps record en plus! Merci Belle-maman!
7. Comme James Bond, j'aime conduire et boire du champagne (mais pas les deux à la fois, parce que je suis une fille sage). Je rêve de posséder une voiture de luxe, comme la Lotus de Mrs Peel...
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analyse moi
Grâce à Zag, parti depuis se ressourcer dans un ashram en Patagonie, je vais vous faire découvrir, chers happy few, une discipline ésotérique qui va bouleverser vos vies.
J'ai nommé la kokologie.
Qu'est-ce donc ? Si l'on en croit l'étymologie, qui m'a toujours sortie des situations les plus embarrassantes ("la salopette, c'est une petite salope ?" me demanda un jour un élève de 6ème à l'issue d'un cours absolument fascinant sur les suffixes...Sans me démonter je lui ai répondu qu'avec la salopette, portée initialement par les ouvriers, on pouvait se saloper, donc se salir ; Alain Rey est mon dieu vivant, parfois j'ai l'impression qu'il s'incarne en moi, c'est une totale expérience mystique... et je viens de faire monter mes stats de manière vertigineuse), la kokologie donc -qu'il ne faut surtout pas confondre avec la bobologie, étude des traumas afférents aux chocs subis par un épiderme fragile, et encore moins avec la totologie, étude des blagues de maternelle mettant en scène le personnage de Toto comme référent cathartique des enfants- doit être, si j'en crois les cours de grec ancien, l'étude du koko.
Eh bien, non, chers happy few, il s'agit de l'étude du kokoro, terme qui désigne en japonais "l'esprit, les sentiments". Je trouve, en bonne analyseuse de cheveux en quatre que ces deux mots ne vont pas vraiment ensemble, mais je ne polémiquerai pas, car aujourd'hui n'est pas un jour faste pour la polémique m'ont dit les haruspices.
La kokologie est donc une science, pratiquée au Japon et les gens qui en sont diplômés sont des psy reconnus (ou qui tentent de nous le faire croire en écrivant leurs titres sur la couverture, la quatrième de couverture et la page de garde).
En quoi consiste-t-elle ? Eh bien, il s'agit de placer le sujet devant une situation de la vie quotidienne, de lui proposer 4 réactions ou pensées possibles et d'analyser ses réponses afin de dresser son profil psychologique.
Par exemple, on vous demande ce que vous prenez au petit déjeuner. Les amateurs de Ricorée ont eu une enfance difficile, ceux qui aiment le café sucré ne savent pas faire face à des situations corsées, ceux qui aiment le café noir sont des amateurs de sensations fortes et ceux qui n'aiment que le thé sont des chochottes. Ne cherchez pas cet exemple dans un manuel de kokologie (décidément, je ne me lasse pas d'écrire ce mot), je l'ai inventé parce que moi aussi je me prépare à passer le diplôme de kokologue, moi aussi je veux vendre des livres qui aident les gens à mieux se connaître, non mais, pourquoi ne kokologiserais-je pas ? (S'entraîner à dire la fin de cette phrase plusieurs fois d'affilée est un bon exercice d'articulation, si Démosthène avait connu cette discipline, il aurait évité d'avaler des cailloux...)
En même temps, côté situation de la vie quotidienne, la perplexité m'envahit parfois... Jugez plutôt.